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1. Pierre-Marie-François de Sales Baillot, L’art du violon: nouvelle méthode (Paris, 1834), 266–67.

La sonate, espèce de Concerto dépouillé de ses accompagnemens, lui donne les moyens de fair briller sa force, de développer une partie de ses ressources, de se faire entendre seul, sans appareil, sans repos, sans autre soutien qu’une basse d’accompagnement; entièrement livré à lui même, il tire ses nuances et ses contrastes de son propre fonds et remplace par la varieté de ses intentions les effets dont ce genre de musique peut manquer.

Dans le quatuor, il sacrifie toutes les richesses de l’instrument à l’effet général, il prend l’esprit de cet autre genre de composition dont le dialogue charmant semble être une conversation d’amis qui se communiquent leurs sensations, leurs sentimens, leurs affections mutuelles: leurs avis quelquefois différens {267} font naitre une discussion animée à laquelle chacun donne ses développemens et se plait bientôt à suivre l’impulsion donnée par le premier d’entr’eux dont l’ascendant les entraîne, ascendant qu’il ne fait sentir que par la force des pensées qu’il met en évidence, et qu’il doit moins au brillant de son jeu qu’à la douceur persuasive de son expression.

Il n’en est pas de même dans le concerto; le Violon doit y développer toute sa puissance; né pour dominer, c’est ici qu’il règne en souverain et qu’il parle en maître: fait pour émouvoir alors un plus grand nombre d’auditeurs et pour produire de plus grands effets, c’est un plus vaste théâtre qu’il choisit, c’est un plus grand espace qu’il demande; un orchestre nombreux obéit à sa voix et la symphonie qui lui sert de prélude, l’annonce avec noblesse. Dans tout ce qu’il fait, il tend plutôt à élever l’âme qu à l’amollir; il employe tour à tour la majesté, la force, la pathétique et ses moyens les plus puissans pour toucher la multitude. Ou c’est un motif élégant et simple qui se reproduit sous différentes formes et conserve toujours l’attrait de la nouveauté, ou c’est un début noble et fier que le musicien articule avec franchise et don’t il développe le caractère soit dans les traits qu’il fait avec énergie, soit dans les chants qu’il rend avec douceur.